L’ossétie du Sud, une bombe silencieuse dans le conflit russo-ukrainien

Par Alexandre Boue – 25/08/2023 – Cet article n’engage que son auteur: la SCUE laisse la liberté à son équipe de publier des revues de presse sans censure.

Le mercredi 23 août 2023, un nouveau chapitre s’ouvre dans le conflit russo-ukrainien avec la relance du conflit géorgien. On doit cette relance au vice-président du Conseil de sécurité russe et ancien Président Dmitri Medvedev qui a déclaré “L’idée de rejoindre la Russie est toujours populaire en Abkhazie et en Ossétie du Sud”. Il ajoute “cela pourrait tout à fait être mis en œuvre s’il y a de bonnes raisons de le faire”. Ici faisant mention d’une potentielle annexion des territoires séparatistes de Géorgie par la Russie.

Pour rappel, la Géorgie avait perdu en 1992 certains de ses territoires, dont l’Ossétie du Sud qui s’était autoproclamée comme république indépendante suite à un conflit armé entre géorgiens et ossètes. L’Ossétie du Sud va proclamer son indépendance sur la base d’un référendum non reconnu par la communauté internationale. Elle va organiser un deuxième référendum où le oui va l’emporter et qui sera seulement reconnu par la Russie sans toutefois lui reconnaître son indépendance. Il faut attendre 2008, lorsqu’une offensive armée géorgienne est mise en place afin de reprendre le contrôle de la région séparatiste qui est soutenue par l’armée russe. L’offensive géorgienne est un échec et conduit la Russie à reconnaître l’indépendance de l’Ossétie du Sud. La Russie sera suivie par le Nicaragua, le Venezuela et les îles Nauru. Certains États comme la Biélorussie, la Serbie ou encore l’Équateur ont envisagé de reconnaître son indépendance sans néanmoins y donner un avis positif.

Finalement, l’intervention russe vient relancer le débat et surtout remettre de l’huile sur le feu dans la région qui est déjà très fortement perturbée par le conflit russo-ukrainien. Dans sa déclaration, le vice-président Dmitri Medvedev évoque ainsi une potentielle annexion du territoire de l’Ossétie du Sud par la Russie qui n’est pas sans rappeler l’ambition expansionniste de la Russie. En effet, si le pays a été poussé par la volonté de rebâtir la Grande Russie de l’ancien temps, l’annexion de l’Ossétie du Sud pourrait parfaitement répondre à cette ambition, car pour rappel, c’est une région qui faisait partie bien évidemment de l’ancienne URSS. Attention cependant, cette annexion ne serait pas seulement motivée par une ambition historique, mais aussi par l’attitude de la Géorgie qui se rapproche de l’OTAN. 

En effet, en relançant les discussions d’une potentielle adhésion de la Géorgie au sein de l’OTAN, la Russie voit l’influence américaine dangereusement se rapprocher. Situation rappelant les évènements et les réactions durant la guerre froide. Les occidentaux ne sont pas les seuls responsables, car les dirigeants géorgiens ont réaffirmé leur volonté d’intégrer l’alliance dans le but de protéger l’intégrité de son pays. Finalement, avec cette déclaration ambiguë, la Russie, à travers Dmitri Medvedev ne fait que confirmer les craintes de la Géorgie et sa volonté de se rapprocher de l’ouest. 

La doctorante en sciences politiques Ana Andguladze appuie le propos en déclarant que la Géorgie est “connue pour sa forte et constante aspiration européenne.” Elle soutient son propos avec l’intervention de la guerre en Ukraine où les observateurs ont pu remarquer que la position géorgienne entre Moscou et l’UE était bien difficile à tenir. Si la Géorgie a lancé sa candidature en 2022 pour rejoindre l’UE, la position de son gouvernement face au conflit russo-ukrainien et sa politique d’apaisement envers Moscou amplifie les critiques à son encontre. Toutefois, il est important de noter que la population géorgienne sera quant à elle acquise à la cause ukrainienne, comprenant aussi l’influence que peut avoir la Russie et les inquiétudes qu’elle peut susciter dans la région. 

Si l’absence de réponse de la part des pays occidentaux pouvait être déconcertante, voire critiquable, cela n’est pas le cas de tous les pays occidentaux, car la Belgique et son ministre des Affaires étrangères qui était présent à la frontière avec l’Ossétie du Sud au moment de la déclaration russe, elle a déclaré qu’il y avait dans la région : “ un conflit gelé qui dure depuis trop longtemps, avec des populations qui souffrent et des défis climatiques ou énergétiques qui sont à l’arrêt à cause de ces guerres et des obstacles mis par les puissances avoisinantes, principalement la Russie.” Le ministre a rappelé aussi que les populations aspirent à une paix, un respect de leur intégrité et la protection de leurs valeurs or c’est parfaitement ce que défend l’UE selon cette même ministre. 

En conclusion, la portée de cette déclaration est encore difficile à cerner, mais ce qui est certain, c’est la relance du conflit russo-géorgien s’inscrivant de manière globale dans le conflit ukrainien. Cette relance pourrait laisser entendre de la volonté de la Russie de déstabiliser la région et surtout de petit à petit reconstruire son empire historique. Avec cette déclaration, la Russie ne cache pas ses intentions politiques et ne laisse pas présager d’un apaisement dans le conflit.

https://www.latribune.fr/economie/international/moscou-pourrait-annexer-les-regions-separatistes-de-georgie-973568.html

https://www.lopinion.fr/international/russie-vers-une-annexion-des-regions-separatistes-georgiennes

https://www.sudinfo.be/id701044/article/2023-08-23/en-georgie-la-ministre-belge-des-affaires-etrangeres-hadja-lahbib-se-rend-sur-la

https://www.courrierinternational.com/article/geopolitique-quinze-ans-apres-la-guerre-russo-georgienne-dmitri-medvedev-evoque-une-possible-annexion-de-l-ossetie-du-sud

https://www.france24.com/fr/europe/20220531-l-oss%C3%A9tie-du-sud-renonce-%C3%A0-organiser-un-r%C3%A9f%C3%A9rendum-d-int%C3%A9gration-%C3%A0-la-russie

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