La gouvernance des migrations en Europe : les défis de la coordination entre les acteurs nationaux et européens

Par Emmy Frédérique – 16/03/2023 – Cet article n’engage que son auteur: la SCUE laisse la liberté à son équipe de publier des revues de presse sans censure.

Depuis quelques années, l’Europe est confrontée à une crise migratoire sans précédent, qui a débuté en 2015 avec l’arrivée d’un million de réfugiés sur les côtes européennes fuyant la guerre en Syrie. Depuis, l’Union européenne et ses voisins de l’Est et du Sud ont été confrontés à un débat complexe, à la fois humanitaire et politique. De nombreux facteurs déclenchent le départ des réfugiés pour un avenir meilleur : les conflits armés, les persécutions politiques et religieuses, la pauvreté et le changement climatique entre autres. 

Malgré l’atrocité de ces problématiques, certains pays, comme la Biélorussie, instrumentalisent l’enjeu migratoire à des fins politiques. À la suite des élections controversées du président Alexandre Loukachenko en août 2020, la situation politique dans le pays est critique. Dès lors, d’importantes manifestations éclatent, dénonçant les élections frauduleuses, qui sont très vite réprimées par le gouvernement, lequel n’hésite pas à bafouer les droits humains. En août 2021, l’afflux de migrants en provenance d’Irak, du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord vers la Biélorussie profite au gouvernement. Les autorités encouragent la traversée illégale en direction de l’Union européenne. Cette situation suscite énormément de tensions au sein de l’Union européenne, alors même que celle-ci a du mal à présenter un front commun sur l’enjeu migratoire. 

L’Union européenne est au cœur d’une crise migratoire accentuée récemment par le conflit ukrainien et par la Biélorussie. L’arrivée en masse de migrants n’est pas le fruit du hasard. L’enjeu migratoire est trop souvent instrumentalisé à des fins politiques. Tout comme la Turquie l’avait fait il y a quelques années pour faire pression sur l’Union européenne, aujourd’hui c’est au tour de la Russie et de la Biélorussie d’user de se levier de pression sur l’UE. Connue de tous, la crise migratoire est un enjeux complexe au sein de l’Union européenne. L’objectif de la Russie et de la Biélorussie est alors de fragiliser l’unité européenne. Afin de contrer l’exploitation des migrants par des pays voisins comme la Biélorussie, l’Union européenne a décidé de rallonger les délais de traitement des demandes de migrants, au risque de violer leurs droits. Les demandes ne pourront être déposées que dans des points de passage frontaliers officiels. Bien sûr, l’Union européenne a mis en place de nombreuses sanctions contre la Biélorussie, notamment l’interdiction de survol de l’espace aérien et l’accès aux aéroports européens. D’autres sanctions économiques ont été prises à l’encontre de la Russie dans le cadre du conflit ukrainien. 

Afin de résoudre plus largement la crise migratoire qui sévit depuis 2015, les États membres de l’Union européenne redoublent d’effort afin de garantir « une politique migratoire efficace, humanitaire et sûre » (Conseil de l’Union européenne). Le conseil européen permet d’établir les lignes d’action et fournit les mandats pour négocier avec les pays tiers. On peut compter aujourd’hui cinq routes migratoires qui mènent à l’Europe : Le méditerranée oriental comptant la Grèce, Chypre et la Bulgarie, la méditerranée occidentale passant par l’Espagne, les routes de l’Afrique occidentale avec les îles canaries, la méditerranée centrale par l’Italie et Malte et enfin les routes des Balkans occidentaux.  

En réponse à l’afflux de plus en plus important de migrants avec une augmentation de 33% chaque année, l’Union européenne a récemment proposé « un pacte européen sur l’asile et la migration » en novembre 2022. Il fait suite à 21 mois de négociation entre les différents ministres de l’intérieur des États membres de l’UE. Ce pacte permet avant tout d’homogénéiser la charge de migrants dans toute l’Europe et non pas seulement au pays transit, comme l’Italie. Cet accord durcit le contrôle aux frontières ce qui permet de dissuader les migrants au départ. De plus, ce plan d’action aura pour mission de renforcer les frontières extérieures, garantir la solidarité entre États membres, harmoniser la politique européenne et mettre fin au système de « Dublin ». Celui-ci oblige les premiers pays d’accueil à traiter les demandes d’asiles de migrants arrivants sur leur sol, cette politique désavantage fortement les pays de transit comme la Grèce ou l’Italie. Malgré les efforts de réforme, l’Union européenne fait face à de nombreux défis dans l’application de ses nouvelles politiques migratoires. Il y a beaucoup de reproches concernant le nouveau plan d’action européen, de la part de la communauté internationale et des États membres de l’UE. En effet, la procédure de demande d’asile doit permettre une accélération des traitements, or on peut se demander si la protection du droit d’asile et du droit à un accès adéquat à la procédure sera garanti par la convention de Genève. De plus, il est important de noter que pour le moment, l’Union européenne n’a pas encore établi un nouveau cadre juridique qui permettra d’organiser concrètement les centres d’administrations des migrants qui sont actuellement débordés.  

En conclusion, l’Union européenne fait face à des défis majeurs en matière d’immigration, notamment en raison de l’instrumentalisation des migrants à des fins politiques par certains pays tiers voisins comme la Biélorussie. Malgré une volonté de réformer la politique migratoire européenne, on peut noter les difficultés de coordination entre les États membres de l’UE. Il est pourtant nécessaire d’instaurer une politique efficace, humanitaire et sûre. Dans ce contexte, l’UE a proposé un Pacte européen sur l’asile et la migration pour répondre à la crise migratoire et homogénéiser la charge des migrants sur l’ensemble de l’Union européenne. Ce pacte est très bien accueillie par les pays de transit, comme l’Italie. Cependant, l’UE doit encore relever de nombreux défis pour mettre en œuvre une politique migratoire efficace et respectueuse des droits des migrants. 

Sources :

Barthélémy Gaillard, 8 février 2023. Qu’est-ce que le Pacte européen sur la migration et l’asile ?. Toute l’Europe, comprendre l’Europe.  

Comité économique et social européen. 20 juin 2022. L’instrumentalisation des migrants et la crise des réfugiés ukrainiens imposent un nouveau départ à la politique migratoire.  

Conseil européen, conseil de l’union européenne. 15 novembre 2021. Biélorussie : l’UE élargit le champ des sanctions pour lutter contre les attaques hybrides et l’instrumentalisation des migrants.

Consilium Europa de l’Union Européenne, Politique migratoire de l’UE, https://www.consilium.europa.eu/fr/policies/eu-migration-policy/#:~:text=Le%204%20mars%202022%2C%20l,le%20s%C3%A9jour (consulté le 26 février 2023). 

Eurostat, Conseil Européen, Conseil de l’Union Européenne. 

OUBAZIZ, Y. 2020. Le Pacte sur la Migration et l’Asile : pourquoi l’Union Européenne a décidé de modifier ses politiques d’asile et de migration. Generation for Rights Over the World.growthinktank.org. [online] Dec. 2020. 

Vues d’Europe. 15 février 2022. « Instrumentalisation » de la migration : la Commission mise sur des dérogations en matière d’asile

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